Le métamorphose du DRH : une libération grâce au numérique

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Le Directeur des Ressources Humaines, abrégé en DRH, est un poste clé dans les entreprises. Si les plus petites d’entre elles n’en possèdent pas, la nécessité de faire appel à ces compétences commence dès lors que la masse salariale atteint une taille critique. Un métier assez ancien au sein des sociétés, qui a peu évolué pendant des décennies, mais qui est pourtant l’un de ceux qui a vu le plus de changements au cours des dix dernières années. Ces changements trouvent racine dans deux révolutions qui se sont effectuées durant ce laps de temps : la transformation numérique et les changements sociétaux. Nous allons justement voir ce qu’il en est dans notre article. 

Comment le numérique a décuplé la productivité 

Sont souvent perçus les postes de management ou de gestion comme étant improductifs, car ne rapportant pas directement (ou même indirectement pour d’autres) du chiffre d’affaires à l’entreprise. Les esprits les plus négatifs avançant même que les ressources humaines ont été dénaturées et perverties à partir des années dix neuf cent quatre vingt dix en France, en apportant dans notre pays des techniques managériales outre-atlantiques cyniques et parfois violentes. On ne peut pas nier que ce fut le cas dans certaines entreprises, notamment via des cas fortement médiatisés. Mais pour l’écrasante majorité des DRH, qui officient dans de grands groupes français et les PME, ce ne fut pas vraiment le cas. En revanche, ce que toutes les ressources humaines ont vu arriver, ce sont les transformations profondes de leur métier avec l’arrivée du numérique. Et pour le meilleur, une fois le temps d’adaptation passé. 

L’exemple le plus actuel étant l’introduction progressive des logiciels de gestion SIRH, autrement dit les systèmes d’information des ressources humaines. Pour faire simple, il s’agit de solutions en ligne, appelées SaaS, pour software as a service. Au lieu de devoir remplir des dizaines de classeurs, de photocopier des documents à la pelle, de devoir rappeler sans cesse les équipes de devoir préparer leurs entretiens individuels, ou encore d’avoir à se rappeler de tout ce qui concerne chaque salarié, les DRH ont enfin un outil qui fait tout ceci et bien plus encore, de façon dématérialisée et centralisée. 

La productivité est montée en flèche chez les DRH car oui, ils sont bien malgré eux soumis à des impératifs d’efficacité dans la quantité et la qualité de leur travail. Du moins pour ceux qui auront su s’approprier judicieusement les SIRH et se former à leur utilisation. En quelques mots, c’est avoir la capacité de se libérer de tâches rébarbatives, peu valorisantes, au profit d’un recentrage sur ce qui fait vraiment le cœur du métier et la valeur ajoutée des ressources humaines : l’analyse et l’anticipation.

Une capacité d’analyse décuplée : avec les SIRH, c’est pouvoir bénéficier d’informations non seulement classées, mais pouvant être aussi comparées. Un bon analyste se doit d’avoir les outils nécessaires pour prendre de la hauteur en toute clarté, sans avoir d’omissions dans ses outils de diagnostic. Une solution SaaS permet de visualiser toutes les informations dont on a besoin dans les ressources humaines, tout en pouvant voir d’un coup d’œil ce qui manque concernant un salarié. 

Pouvoir anticiper : les SIRH sont de puissants outils qui, nous l’avons vu, permettent de faire des observations grâce à du data (informations) centralisé. Combien de salariés ont eu des arrêts maladies sur l’année et comparer ce chiffre avec les années précédentes, pouvoir enregistrer des informations clés comme le désir de formation individuelle et les confronter sur différentes périodes, ne sont que quelques exemples des données désormais facilement accessibles pour les DRH. Sans entrer dans les détails, un SIRH peut même être enrichi de modules à installer en fonction de ses besoins, comme par exemple un outil servant à mieux préparer les entretiens annuels. 

Pouvoir se confronter aux changements sociétaux 

Nous l’avons évoqué, les aspirations collectives de la société changent rapidement ces dernières années : volonté de plus d’égalité de traitement, forte demande de justice sociale, modifications profondes des motivations quant aux attentes vis-à-vis de sa carrière, etc. Le monde de l’entreprise est un miroir parfait de la société, ce qu’un DRH ne devrait jamais oublier. Bien sûr, des différences existent en fonction du secteur d’activité, mais globalement les observateurs spécialisés le disent tous : les transformations profondes dans l’entreprise sont déjà parmi nous. 

La meilleure illustration étant le phénomène venu (encore) des Etats-Unis : le Big Quit, ou en français la Grande Démission. Les magazines spécialisés dans les ressources humaines s’emparent enfin de cette lame de fond qui menace parfois l’équilibre fragile de certaines entreprises, qui ont de plus en plus de mal à faire de la rétention de leurs salariés, notamment les plus talentueux. A la recherche d’une quête de sens allant parfois jusqu’au métaphysique, les plus jeunes salariés n’ont plus du tout les mêmes aspirations que leurs aînés en entreprise, ni le même équilibre souhaité entre vie professionnelle et privée. 

Le secteur de l’informatique, avec une compétition féroce entre les chasseurs de têtes, illustre parfaitement ce mouvement qui est amené à s’étendre partout en France. Les développeurs, data scientist et autres administrateurs réseaux sont très recherchés par des sociétés aux profils divers et n’hésitent pas à promettre de hauts salaires pour attirer les talents. Mais pour les DRH qui n’ont que ce mot à la bouche, c’est en vain. Les jeunes ne cherchent plus à faire carrière dans une seule entreprise, avec un haut revenu comme seule motivation. Les sondages le confirment : les entrants dans le monde du travail sont en quête de sens, d’entreprises avec qui partager des valeurs communes, ou encore pouvoir bénéficier de plus de libertés que leurs aînés.

Les entreprises les plus anciennes ne sont pas forcément les seules devant refonder entièrement leur regard sur les jeunes talents : même les startups peuvent tomber dans des travers qui n’attirent plus. Faire soixante heures de travail par semaine, même pour un salaire intéressant (ce qui est loin d’être systématique) n’est plus du tout toléré. Désormais, on hésite plus à démissionner quand on remarque un hiatus entre ses aspirations et les attentes parfois hors sol des entreprises. C’est pourtant dramatique pour ces dernières, qui forment souvent les jeunes salariés qui, du coup, prennent la porte pour aller chez la concurrence, éventuellement plus compréhensive et arrangeante. Une leçon que chaque DRH devrait retenir, quitte à jeter à la corbeille des années de certitudes dans les ressources humaines.